Calendrier de l'avent du domaine public - 2014/2015

Qui s’élèvera dans le domaine public en 2019 ?
Chaque jour de décembre, découvrons le nom d’un auteur dont les œuvres entreront dans le domaine public le 1er janvier 2019.

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Reynaldo Hahn

  • jeudi 28 décembre 2017
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  • Dans le DP en 2018

En juin 1921, Marcel Proust présente Reynaldo Hahn comme un « autre moi-même » : entre l’écrivain et le compositeur s’était noué depuis vingt-cinq ans un indéfectible lien d’amour et d’amitié.

La vie de Hahn semble elle aussi guidée par une recherche du temps perdu, mais une recherche distendue dans l’espace. Le jeune Reynaldo naît bien loin de Paris ou de Combourg : au Venezuela entre 1874 et 1875 (sa date de naissance n’est pas connue avec certitude). Son père, un ingénieur allemand, a tenté sa fortune en Amérique du sud. Le jeune Reynaldo grandit dans un climat d’intrigue à la Garcia Marquez : proche du président Antonio Guzmàn Blanco, le père prend le large à l’expiration du premier mandat de ce dernier en 1877 et installe la famille à Paris.

Hahn se met au piano quelque part entre le Venezuela et la France, voire au cours d’une traversée transatlantique : « à trois ans, haut comme le tabouret du piano, je savais déjà poser mes doigts sur le clavier ». Prenant conscience de ses dons précoces, ses parents l’emmènent régulièrement à l’Opéra-comique puis l’inscrivent au Conservatoire où il suit notamment les cours de Jules Massenet (qui, plus qu’un simple professeur, deviendra son grand « Maître »)

Hahn écrit sa première mélodie à 14 ans (Si mes vers avaient des ailes, sur un texte de Victor Hugo) et la publie dès 1889 dans une revue littéraire et musicale. Un an plus tard, toute la grande presse parisienne se fait l’écho d’un « tout jeune musicien » qui vient de rédiger la partie musicale d’une pièce d’Alphonse Daudet, L’Obstacle

La carrière de Hahn est lancé. Tous les salons parisiens sollicitent ce dandy séduisant qui joue et chante un répertoire impressionnant, en plus de ses propres compositions. Et c’est lors d’une de ces soirées qu’il croise la route de Marcel Proust. Les deux hommes se mettent discrètement en couple (notamment à la faveur d’une retraite en 1895 dans un petit village breton). Ils envisagent de grands projets communs telles une Vie de Chopin, qui ne verra jamais le jour.

Après cet intermède, Hahn reprend une activité musicale intense, qui ne cessera jamais jusqu’à sa mort en 1946. Opéra, ballets, mélodies, concerto, musique de chambre : il touche à tous les genres et accède à une renommée internationale pour ses opérettes et ses comédies musicales qui adaptent remarquablement la tradition de l’opéra-comique à l’ère de Broadway

De ces œuvres nous ne pouvons dire que peu de choses : en 2018, seules les créations non-musicales de Hahn entrent dans le domaine public. Les compositions musicales européennes ont en effet un statut à part dans le code de la propriété intellectuelle françaises : en conséquence de la loi Lang de 1985, elles sont toujours concernées par les « prorogations de guerre ». L’œuvre de Hahn entre ainsi à plusieurs reprises dans le domaine public :
*Le 1er janvier 2018 pour les textes et les livres. Hahn a mené en parallèle une importante carrière de pédagogue et de vulgarisateur. Il rédige la critique musicale des plus grands quotidiens de son temps (comme L’Excelsior ou Le Figaro) et devient en 1920 professeur de chant à l’École Normale de Musique. Ses leçons ont servi de base à plusieurs traités comme Du Chant. Sa correspondance et son journal constituent également d’importants témoignages de la vie culturelle et artistique français au tournant du XIXe et du XXe siècle (même si ses lettres à Proust n’ont malheureusement pas été conservées).
*Le 30 avril 2026 (extension de 8 ans et de 120 jours au titre de la Seconde Guerre Mondiale) pour les œuvres musicales postérieures à 1919, comme son opérette Ciboulette (dont le texte est déjà dans le domaine public) ou son Concerto pour piano.
*Le 29 septembre 2032 (extension de 14 ans et 272 jours : à la prorogation de la Seconde Guerre s’ajoute les 6 ans et 152 jours de la Première Guerre) pour les œuvres musicales antérieures à 1919.

La première mélodie composée par Hahn en 1886, Si mes vers avaient des ailes, se trouve ainsi protégée pour… 146 ans, soit quasiment un siècle et demi (!).

En attendant, de nombreux textes de Hahn ont été numérisés grâce à l’excellent travail mené par l’Association des amis de Reynaldo Hahn. Il est déjà possible de découvrir ses écrits pédagogiques, ses critiques musicales ou quelques extraits de sa correspondance. À partir du 1er janvier ces documents importants feront partie des biens communs de la connaissance. La musique attendra le calendrier de l’avent de 2026 ou 2032…

Sources :

Wikipedia : https://fr.wikipedia.org/wiki/Lucien_Manuel
Philippe Blay, L’île du rêve de Reynaldo Hahn. Contribution à l’étude de l’opéra français de l’époque fin-de-siècle. Thèse en musicologie soutenue en janvier 1999 à l’Université de Tours.
Roger Delage, Reynaldo Hahn et Marcel Proust
Correspondance avec Proustsur reynaldo-hahn.net.


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