Calendrier de l'avent du domaine public - 2014/2015

Qui s’élèvera dans le domaine public en 2019 ?
Chaque jour de décembre, découvrons le nom d’un auteur dont les œuvres entreront dans le domaine public le 1er janvier 2019.

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Happy Birthday

  • mercredi 30 décembre 2015
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  • Dans le DP en

La destinée singulière de la chanson Happy Birthday illustre à celle seule les difficultés qui affectent le domaine public et les failles qui permettent à certains de s’approprier indûment ce qui devrait rester le bien de tous. Heureusement, l’année 2016 devrait être la première où cette chanson célèbre entre toutes entrera dans le domaine public et deviendra libre de réutilisation.

L’histoire d’Happy Birthday remonte à la seconde moitié du XIXème siècle. Deux soeurs du Kentucky, Mildred et Patty Hill, l’une institutrice et l’autre pianiste, écrivirent une mélodie pour accompagner la chanson "Good Morning to You" qu’elles jouèrent aux enfants de leur école. L’air devint populaire et se diffusa d’abord dans le Kentucky, puis dans tous les Etats-Unis. En 1893, la Summy Company, un éditeur de partitions, déposa pour la première fois un copyright sur la chanson.

Au début du XXème sicle, de nouvelles paroles apparurent, en lien avec la célébration des anniversaires, sans que l’on sache qui en fut exactement à l’origine. Sous cette forme, la chanson commença à être connue à l’étranger. La Summy Company déposa un nouveau copyright en 1935 ; elle changea ensuite plusieurs fois de mains, avant être rachetée en 1988 par une branche des studios Warner.

C’est le point de départ pour la Warner d’une affaire juteuse. Utilisant ses armées d’avocats pour revendiquer agressivement des droits d’exploitation sur ce morceau connu mondialement, la Warner va exiger des paiements chaque fois que l’air sera utilisé dans un cadre professionnel, notamment dans les films, à la télévision ou dans des spectacles. L’an dernier encore, ces royalties représentaient plus de deux millions de dollars.

Mais un groupe de réalisateurs décida il y a deux ans de refuser de payer ces sommes, qui pouvaient atteindre plusieurs milliers de dollars pour un passage d’Happy Birthday de quelques secondes dans un documentaire. Ils formèrent une action de groupe (class action) pour faire invalider le copyright de la Warner par la justice américaine.

En séptembre dernier, après de nombreuses péripéties procédurales, le juge saisi de l’affaire a finalement donné raison à ces réalisateurs, en reconnaissant formellement que la Warner s’était livré pendant des années à une pratique relevant du copyfraud. Un cahier de chansons datant de 1927 a en effet pu être produit par les plaignants qui attestait que des partitions d’Happy Birhtday circulaient déjà à ce moment. Le copyright de 1935 de la Warner ne pouvait donc porter que sur un arrangement particulier, mais pas sur la mélodie en elle-même, ni non plus sur les paroles, dont on ne connaît pas l’auteur.

La Warner a semblé un moment refuser la défaite en portant l’affaire en appel. Un organisme de charité s’est aussi immiscé dans la procédure en affirmant qu’il était le propriétaire légitime des droits sur Happy Birthday. Cette fondation, créée à l’origine par Patty Hill pour récolter les droits d’exploitation sur la chanson, touchait depuis des années une partie des royalties levées par la Warner.

Mais finalement,au cours du mois de décembre, les parties ont annoncé la conclusion d’un accord aux termes duquel la Warner et la fondation renonçaient à leurs prétentions. Happy Birthday sera donc bien librement réutilisable l’an prochain. Sans cette procédure, il aurait fallu attendre 2030 pour que cesse le copyright de la Warner...

L’histoire d’Happy Birthday illustre l’absurdité à plaquer les schémas du droit d’auteur sur des créations collectives, pour lesquelles interviennent des auteurs individuels, mais dont la diffusion et la forme sont largement la résultante de l’appropriation populaire et d’apports successifs bouleversants la notion même de paternité.

Happy Birthday appartenait en réalité au domaine public dès son origine, mais c’est en 2016, plus d’un siècle après, que cet air sera vraiment rendu à tous.


Article Wikipédia : https://en.wikipedia.org/wiki/Happy...


Domaine public

En droit pur, il n’est pas complètement impossible que de nouveaux acteurs surgissent pour revendiquer des droits sur Happy Birthday. Mais cette hypothèse est à présent assez improbable, car ils auraient certainement du mal à apporter des preuves formelles de paternité et celles qui étaient connues à ce jour ont largement été produites dans le cadre du procès. Il n’en reste pas moins qu’Happy Birthday restera sans doute toujours pour une part une oeuvre orpheline.


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