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« Mon père était un traître, mais il était tendre avec moi et il m’aimait ».
C’est ainsi qu’Heather Piercy se souvient de son père William Joyce (1906-1946), dans un entretien accordé au journal le Guardian en 2005.
William Joyce est né d’un père nord-irlandais à Brooklyn en 1906. Il est donc américain. Sa famille retourne rapidement en Irlande où il est élevé, avant de poursuivre ses études en Angleterre en 1921 après avoir participé à des actions contre l’IRA pour le compte des « Blacks and Tans » (militaires britanniques envoyés en renfort de la police royale irlandaise). Ce qui lui a permis d’obtenir un passeport britannique dans les années 30 pour assister au procès de Nuremberg. Sympathisant puis membre de la British Union of Fascist (BUF), il s’expatrie en Allemagne en 1940 et acquiert la nationalité allemande par naturalisation. Il est donc allemand.
Difficile de savoir s’il a été un traître pendant la seconde guerre mondiale : s’il est allemand, non. Par contre, si on prend en compte la date de validité de son passeport britannique on peut le considérer coupable de haute trahison envers son pays. C’est en tout cas sous ce chef d’accusation qu’il a été jugé puis exécuté à Londres le 3 janvier 1946.
Un des hommes les plus haï d’Angleterre
Traître ou non, William Joyce était en tous les cas profondément antisémite. Attaqué pendant un meeting politique en 1924 par un sympathisant communiste, il en garda une cicatrice sur la joue droite. Il soutint toujours que ses agresseurs étaient juifs, ce qui laisserait entendre qu’il partageait déjà certaines idées avec Adolph Hitler (qui développe dans Mein Kampf la théorie que le mouvement communism a été lancé et financé par le complot juif). Militant faciste (même s’il a hésité à adhérer au parti britannique, le trouvant trop mou), il quitta l’Angleterre au début de la seconde guerre mondiale avant d’être arrêté pour ses idées politiques et s’envola pour l’Allemagne nazie.
« Germany calling, Germany calling »
Déjà un brillant orateur, il devint rapidement un très bon propagandiste radio. Sous le nom de Lord Haw-Haw, il diffusait avec beaucoup de conviction (et en anglais) des campagnes de désinformations pour les troupes alliées, assorties de menaces diverses. Ses émissions hebdomadaires étaient suivies en Angleterre par plusieurs millions de personnes (le chiffre de 16 millions a été avancé) alors que les diffusions de la BBC étaient soumises à la censure du War Office et transmettaient paradoxalement moins d’informations sur le conflit.
Et c’est parce que son passeport était encore valide au moment où il enregistrait ses productions en Allemagne que le tribunal de Old Bailey le déclara coupable par trois fois.
Il lança son générique “Germany calling” pour la dernière fois le 30 avril 1945 pendant la bataille de Berlin. Capturé peu après à la frontière germano-danoise, il sera pendu au début de l’année suivante.
« Frères humains qui après nous vivez... »
William Joyce n’a pas laissé à la postérité le message humaniste de François Villon. Ses dernières paroles furent "In death as in life, I defy the Jews who caused this last war, and I defy the powers of darkness they represent." (Dans la mort comme dans la vie, je me dresse contre les juifs qui ont causé cette guerre et contre les forces des ténébres qu’ils représentent)
Enterré tout d’abord à la prison de Wandsworth, sa fille a finalement obtenu que son corps soit déplacé dans un cimetière irlandais. L’Angleterre ne voulait pas que sa tombe soit vandalisée ou devienne un symbole pour les mouvements d’extrême droite sur son territoire.
Il fait entrer dans le domaine public, outre ses émissions radiophoniques un écrit intitulé Twilight over England publié en 1940 (et en allemand par le ministère de la propagande nazie Dämmerung über England en 1942) où il donne sa définition de ce que devrait être un national socialisme britannique, en défense contre la finance internationale, ennemie de toutes les nations… Même si le texte ne devient public qu’en janvier, on le trouve assez facilement sur internet.
Biographie de William Joyce sur Wikipédia :
https://en.wikipedia.org/wiki/William_Joyce
Article de Francis Beckett du Guardian (05 décembre 2005)
https://www.theguardian.com/politics/2005/dec/05/past.secondworldwar
Emissions disponibles sur le site de la BBC :
http://www.bbc.co.uk/archive/hawhaw/
Deux biographies :
Mary Kenny. Germany Calling . New island, 2004
Nigel Farndale. Haw-Haw : the Tragedy of William and Margaret Joyce. Pan Publishing, 2005