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(Aztec) (Coronation Stone of Motecuhzoma II (Stone of the Five Suns) ) (1503) (Basalt ) (55.9 × 66 × 22.9 cm ) (1990.21 )
Une petite entorse à la règle du calendrier qui consiste à vous présenter des auteurs ou des œuvres qui entrent dans le domaine public au 1er janvier 2019.
C’est fin octobre 2018 que l’Art Institut de Chicago (ARTIC) a décidé de libérer ses collections, en offrant un accès illimité aux images numérisées de son site internet, si les œuvres correspondantes appartiennent au domaine public. Il est donc possible de télécharger les fichiers en haute définition, sans autorisation préalable et pour n’importe quel type d’usage, même commercial.
Le musée a fait le choix de proposer ses œuvres sous la licence CCO (celles encore soumises au droit patrimonial sont assorties d’un copyright). La seule condition de réutilisation des œuvres par l’ARTIC est de les légender.
(Claude Monet) (Water Lilies)( 1906) (Oil on canvas ) ( 89.9 × 94.1 cm) (1933.1157 )
(Vincent Van Gogh) (The Bedroom) (1889 ) (Oil on canvas ) ( 73.6 × 92.3 cm) (1926.417 )
D’autres musées proposent déjà cette opportunité. On peut citer la National Gallery de Washington, la Tate Modern de Londres, le MET de New-York en 2017 ou le précurseur Rijksmuseum d’Amsterdam (dès 2013). Le Rijksmuseum va même plus loin. Si le site propose de télécharger ou partager, il incite également les internautes à partager leurs créations inspirées des collections. Un concours annuel est même organisé, et permet de voir à quel point le domaine public est source de créativité : bonnets tricotés en s’inspirant des temples d’Ankhor, lampes en forme de collerette, préservatifs emballés dans des gravures d’Adam et Eve, tatouages d’arabesques, lentilles de contact en bleu de Delphes...
Cette stratégie arrive timidement chez nous. Le15 novembre dernier, la ville de Paris annonçait le passage en open content des photographies des œuvres appartenant à ses collections ; elles devraient prochainement être disponibles en ligne et en haute définition sous licence libre. Le conseil municipal de Grenoble actait le même principe en mai.
Au-delà des questions financières et d’un faux débat sur les coûts de numérisation, certaines institutions ont bien intégré dans leur politique d’accès aux contenus culturels cette libre réutilisation et les nouvelles pratiques qui en découlent. La bibliothèque de Valence Romans agglo profite de la mise en ligne de fonds patrimoniaux pour faire de l’indexation collaborative ; à l’instar des appels au crowdsourcing pratiqué par le Musée de Bretagne sur son récent portail des collections (2017).
Dans l’univers des collections muséales, les bases patrimoniales sont en ligne depuis 1995. Malheureusement, l’accès n’est toujours pas assorti d’une possibilité de réutilisation de ces données culturelles. La dernière version de la base Joconde accessible sur le site data.gouv.frne propose aucune image. Le ton général, donné par la RMN-GrandPalais (société de gestion des droits des reproductions des œuvres des musées nationaux), reste toujours au copyfraud et à la protection des données.
Pourtant les rapports qui argumentent clairement en faveur d’une ouverture des données des collections de nos musées sont nombreux et très explicatifs : en 2012, déjà, le rapport OpenGLAM proposait des pistes d’actions pour favoriser l’accès à la culture en ouvrant des données. A travers la valorisation des rares exemples de l’époque, le rapport articulait volonté politique affirmée accompagnée de pédagogie et de changements législatifs. Les initiatives de mise en ligne des œuvres du domaine public et de possibilité d’utilisation sans contraintes ne sont pas simplement un appel à la créativité et à la redécouverte de notre patrimoine commun. La politique d’ouverture du MET a permis en 2017 une croissance de 17% vers les collections en ligne.
Directement de l’intérieur, publié par le Ministère de la Culture lui-même en 2013, le rapport "Ouverture et partage des données publiques culturelles, pour une (r)évolution numérique dans le secteur culturel" prônait peu ou prou les mêmes pistes d’évolution. Citée en exergue, la citation de la ministre en annonçait l’ambition :
"
Passer d’une politique de l’accès aux données à une politique de réutilisation des données : c’est le changement de paradigme qui est au cœur de la politique des usages numériques que je souhaite mener
".
Encore en 2018, les rapports au sein même des réseaux de recherche et de professionnels continuent de dire la même chose. On retrouve ainsi dans le rapport final du programme Images/usages publié cette année et piloté par le très officiel Institut National de l’Histoire de l’Art (INHA) les mêmes recommandations à l’attention du Ministère de la Culture et des institutions culturelles pour mettre en place de réelles politiques de diffusion des données culturelles, in fine de la culture elle-même.
Aujourd’hui, la réponse de l’État et du ministère de la Culture est POP : POP c’est la nouvelle Plateforme Ouverte pour le Patrimoine conçue et pilotée par une start-up d’état dont la méthodologie reste à discuter, et qui, au final, malgré les mots, ne fait pas évoluer d’un iota la question de la libre réutilisation des images des œuvres du domaine public conservées dans les collections publiques françaises.
Nous espérons, et ce sera donc le vœu que nous formulons pour 2019, que de plus en plus de collections s’élèvent dans le domaine public pour favoriser la culture, la curiosité et la recherche.
Sites de collections publiques :
Art Institut of Chicago (Artic) : https://www.artic.edu/
Rijksmuseum studio : https://www.rijksmuseum.nl/en/rijksstudio
MET New York : https://www.metmuseum.org/art/collection
National Gallery Washington : https://images.nga.gov/en/page/show_home_page.html
Tate Modern de Londres : https://www.tate-images.com/index.asp
L’Empreinte (médiathèque Valence Romans agglo) : https://www.lempreinte.valenceromansagglo.fr/
Musée de Bretagne (Rennes agglo) : http://www.collections.musee-bretagne.fr/message_info.php
Exemples de création sur le Rijkstudio :
https://www.rijksmuseum.nl/en/rijksstudio/32947--zarathustra/creations
https://www.rijksmuseum.nl/en/rijksstudio/1882689--entries-rijksstudio-award-2017-top-10/creations